Quand on dit Foudizè, on voit d’emblée Chelson Ermoza, Johny Zéphirin, Billy Elucien, Woodelyne Fleurillus, Nélio Joseph. On connaît beaucoup moins Dieulifète, le technicien de la troupe, parce qu’il est plutôt l’homme de l’ombre. Pourtant, sans son implication en backstage dans la préparation des spectacles, on peut se demander ce que serait le jeu, voire le génie, de ses collaborateurs
Publié le 2017-11-14 | Le Nouvelliste
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Visage relativement barbu, des verres simples… Dieulifète Elicien a tout l’attirail d’un geek. C’est le technicien de Foudizè. « L’homme à tout faire », comme il se plait à se présenter. Au sein de l’équipe qu’il a rejointe en 2007, il est en quelque sorte le cas spécial puisqu’il n’est pas comédien. Cependant, sans lui, le génie des autres, leur jeu auraient manqué de quelque chose. « Je me réjouis de ne pas avoir à me produire sur scène mais d’être partie prenante dans la préparation de ce qui s’y passe », explique-t-il.
C’est le petit frère de Billy Elucien, le metteur en scène. Son patronyme est dépossédé du u, remplacé maladroitement par un i, parce que l’officier d’état civil a dû mal entendre, selon lui. « Se ofisye deta sivil ki ba moun non an Ayiti », regrette-t-il sur un ton ironique.
Avec des grands frères et une grande sœur tous férus de théâtre, il ne pouvait donc pas échapper à cette passion familiale. Il était comme tiraillé entre les diverses troupes auxquelles chacun des aînés appartenait. Il lui arrivait de décrocher des petits rôles.
Même quand Billy rejoint Foudizè en tant que metteur en scène, il n’impose pas son petit frère aux autres en tant que comédien. Cependant, il ne l’empêchait pas de suivre les répétitions de la troupe. Quand Dieulifète se retrouve dans ce cercle de personnes qui n’ont pas son âge, il lui arrive de leur rendre des services, de jouer en quelque sorte au « ramasseur de balles ».
Ce sont plutôt les autres qui ont demandé à Billy de l’embaucher en tant qu’accessoiriste. Dès 2007, il réalise certaines affiches pour la troupe. Il s’occupe du décor, du bruitage, du son, s’assure des changements de costumes par les comédiens. C’est lui le responsable du payroll en remplacement de Nélio Joseph qui étudie en France actuellement. Il est donc toujours dans la cuisine des spectacles et rarement sur scène. La seule fois qu’il s’est produit au sein de Foudizè, c’était en remplacement d’unacteur qui a désisté à la dernière minute dans le cadre d’un spectacle de rue. « J’ai assuré parce que le théâtre est une passion éternelle pour moi. En plus, le rôle qu’on m’attribuait faisait appel à un peu d’improvisation », raconte-t-il.
L’homme qui évolue dans l’ombre avoue qu’en plus d’être un peu timide, il préfère de loin le backstage que le devant de la scène. Cet amour pour la technique lui a donc inspiré de poursuivre des études en télécommunication. Il est d’ailleurs en dernière année. Il est le propriétaire d’un cyber café. Son ambition c’est de devenir un spécialiste de l’éclairage au sein de la troupe qui sollicite l’expertise externe pour cela.
Difficile pour lui de désigner le meilleur parmi tant de souvenirs expérimentés depuis qu’il a intègré Foudizè. La première représentation de « Gwo Moso » par la troupe en 2007 a été un moment fort pour lui parce que c’était son tout premier spectacle en tant que technicien. « Je devais, dit-il, convaincre les autres. C’était un défi à relever ».
Le souvenir le plus douloureux, c’est d’avoir constaté en 2010 que leur projet d’animation culturelle à l’intention des sinistrés des camps du Champ de Mars n’avait pas fait long feu. « Parce que personne à l’époque ne voulait soutenir un tel projet qui a fait par contre des inconditionnels parmi les bénéficiaires », témoigne le plus jeune des Elucien.
Quatre Chemins, selon lui, c’est une vitrine pour la création théâtrale. Il loue le fait que les responsables s’acharnent à pérenniser un art traité en parents pauvres dans notre pays. Au grand public qui viendra voir Foudizè à cette édition de Quatre Chemins où elle fera office d’invité d’honneur, il dit l’attendre et assure qu’il ne sera pas déçu. « Nou pa chanje », conclut-il.

Chancy Victorin
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